Basé sur les arrêts du 14 septembre 2010 et du 14 octobre 2010
- Droit applicable aux privilèges et hypothèques maritimes
- Interprétation stricte des privilèges maritimes
1. Droit applicable aux privilèges et hypothèques maritimes
Concernant les privilèges et hypothèques maritimes consentis à l’étranger, il faut distinguer entre la constitution et la validité de la sûreté régies par la loi du contrat (lex causae), et les conditions d’exécution des privilèges et hypothèques, régies par la loi du lieu de saisie (lex arresti).
Notons que la Convention de Bruxelles de 1926 sur les privilèges et hypothèques maritimes, qui invite les juges à respecter les sûretés accordées à l’étranger, n’est applicable qu’à la saisie d’un navire battant pavillon d’un État contractant.
Concernant le classement des créanciers, la jurisprudence française assure la suprématie des privilèges maritimes sur les hypothèques, principe adopté internationalement. Occasionnellement, les juridictions inférieures appliquent la lex arresti sans vérifier si les privilèges valides sous la lex causae sont également valides sous la lex arresti, point pouvant conduire à des implications significatives.
2. Interprétation stricte des privilèges maritimes
Concernant la saisie de navire, le droit français a un caractère dual. Il comprend les dispositions internationales de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952, applicable en France depuis le 24 février 1956, et les règles nationales sous la Loi n° 67-5 du 3 janvier 1967, et le Décret n° 67-967 du 27 octobre 1967. Les privilèges maritimes exigent une interprétation stricte, illustrée par l’article L.5114-8, 6° du code des transports français.
Une question essentielle est de savoir si le propriétaire peut s’opposer à la saisie du navire en prétendant qu’il n’est pas le débiteur. La Cour d’appel de Nouméa a statué que les privilèges maritimes s’attachent au navire lui-même, pas nécessairement dépendants de la dette personnelle du propriétaire. Ainsi, les créanciers d’un affréteur peuvent saisir le navire s’ils invoquent un privilège maritime valide.
a) Une créance alléguée
La première condition pour invoquer un privilège maritime est facilement remplie ; il suffit d’invoquer l’apparence d’une dette. Contrairement aux privilèges généraux, l’urgence n’est pas requise, et les contextes commerciaux n’imposent pas de règles probatoires strictes telles que celles de l’article 1341 du Code civil concernant la preuve écrite.
b) dépenses entreprises par le capitaine pour les besoins réels du navire
La seconde condition est plus nuancée. Selon l’article L.5114-8, 6° du code des transports, les dépenses engagées par le capitaine du navire pour des besoins véritables créent un privilège maritime. Ces services doivent être commandés par le capitaine hors du port d’immatriculation du navire, reflétant les pouvoirs statutaires et un engagement contractuel préalable. De nombreuses opérations échappent à ce privilège en raison de cette exigence.
Les interprétations judiciaires affirment ce critère strict. Par exemple, simplement tamponner et signer des factures, bien que prouvant l’exécution du service, ne constitue pas une preuve d’ordre du capitaine du navire, nécessaire pour la validité du privilège.
Les privilèges maritimes, comme tous les privilèges, exigent une interprétation stricte adhérant précisément à la législation. Les lois maritimes ne résolvent pas toutes les complexités ; par exemple, est-il justifiable que seules les créances du consignataire d’un navire, malgré une autorité limitée comparée aux agents maritimes, jouissent d’un statut privilégié ?